MAEVE

Déesse celtique, Maeve symbolise la puissance féminine et le cycle de la vie. Elle est l’un des avatars de la « Terre-Mère », une héritière des Vénus paléolithiques. Maeve donne son nom à cette série d’oeuvres, paysages délicatement déployés entre la matière et la lumière, entre l’organique et l’artificiel.

Tournay arpente les carrières de l’Est de la France, où granit et marbre sont sortis de terre pour orner les cimetières. Elle rassemble les rebuts des marbreries : chutes, fragments irréguliers ou sous- dimensionnés, stèles à moitié polies, comme suspendues dans la mémoire double de la pierre et des vivants. Le polycarbonate vient ensuite, lui aussi tiré de rebuts industriels, plié et modelé par ses mains. Translucide, ondoyant, il s’enroule autour de la stèle, l’enveloppe et la traverse comme un souffle. Le dernier geste ne lui appartient plus. C’est à la lumière qu’il revient de donner vie à la matière, d’animer la pierre et le souffle. Changeante, elle bouleverse l’oeuvre à chaque nouveau regard.

Soufflées puis thermoformées au contact de son corps, les pièces de la série Maeve adoptent des formes organiques. Dans ces bribes de corps féminin, on retrouve les échos de « Terres- Mères » ancestrales autant que les reflets d’une goutte d’eau, le bouillonnement de la mer, les franges d’un nuage. Tirées de l’artificiel, façonnées par mon étreinte, elles célèbrent une force vitale indomptable, douce et puissante.

Elles naviguent entre transparence cristalline et irisations métalliques, déployant un spectre chromatique allant du nacré glacé aux bleus profonds, ponctué d’éclats turquoise, jaunes et violets. Traversées par la lumière, elles entrent en résonance avec leur environnement, habitant l’espace dans un subtil jeu de présence et d’absence. Elles projettent des ombres mouvantes aux reflets colorés, qui s’étendent alentour et métamorphosent l’espace.

La série Maeve est le fruit de trois années de recherches théoriques et techniques. Elle incarne une longue exploration de la représentation féminine, autour du prototype mythologique de la « Terre-Mère » et de l’étude de figures archaïques lors de sa résidence à la Chapelle Saint- Antoine, en Grèce, en 2024. Exposé lors de la Nuit Blanche de Paris, l’année passée, le projet Maeve continue d’interroger, sous des formes toujours nouvelles, le lien entre la vénération de la « Terre-Mère » et l’expression des puissances naturelles. À la lisière du mouvant et de l’inanimé, quand nuit et jour se confondent, Maeve passe comme un souffle.